QUATRE HAÏKAÏ (2003)

 

Pour soprano & piano
Sur des haïku de Michèle Venture

 

à Mélody Louledjian et Thierry Ravassard

Durée : 10 minutes 10
Editions Durand, Paris

  1. 1. Jaillissement (Printemps) (1'40)
  2. 2. Attente (Été) (2'45)
  3. 3. Symphonie (Automne) (2'30)
  4. 4. Cendres (Hiver) (3'15)

Le pianiste Thierry Ravassard m'a proposé de composer, en juin 2003, un cycle de mélodies pour soprano et piano sur des haïku érotiques de Michèle Venture. Ces textes font partie d'un recueil de poèmes manuscrits écrits en avril/mai 1997 à la mémoire de Murasaki Shikibu, la dame de Kyoto.
La création a eu lieu trois mois plus tard, le trois octobre, à l'Institut Franco-Japonais du Kansaï de Kyoto par la jeune soprano Melody Louledjian et mon commanditaire.

 

Comme pour les Cinq Haïkaï pour piano, j'ai choisi quatre poèmes correspondant aux quatre saisons.

 

Jaillissement (Printemps)
C'est une lente progression, emprunte de sensualité, qui se développe jusqu'à l'épanouissement, puis retourne à l'apaisement du sommeil. La partie pianistique développe une fluidité essentiellement linéaire, mais harmoniquement riche d'ambiguïtés.

 

Attente (Été)
L'attente n'est que songe et tristesse en pensant <à son corps jeune et vigoureux… qui ne viendra pas>. Long obstinato du piano en quintolets et teinté de douceur. La partie vocale est une lente imploration s'exprimant comme dans un rêve qui suivrait la courbure d'une voûte céleste.

 

Symphonie (Automne)
L'éclatement éphémère initial suivi de ses jaillissements et éparpillements successifs forme la première partie de cette mélodie. La deuxième n'est qu'une accalmie progressant jusqu'à l'extinction, telle une feuille desséchée qui plane jusqu'au sol.

 

Cendres (Hiver)
Mélodie lente et caressante qui s'exprime <comme une empreinte glacée>, puis se distend peu à peu en s'amenuisant jusqu'à la fin. La partie vocale est basée sur trois sons essentiels : le sol, le mi et le si, tandis que celle du piano s'exprime par une mixité entre dodécaphonisme et atonalisme.
Un long et lent flottement rythmique entre les sons extrêmes du clavier apporte à la fois transparence et sensation de vide. La raréfaction des éléments amène progressivement l'absence ultime de vie.

[ Yves Prin ]

  • Création mondiale le 03.10.2003
    à Kyoto (Japon), Institut Franco-Japonais du Kansaï, Salle Inabata
    par Mélody Louledjian et Thierry Ravassard
  • Création française le 31.01.2004
    à Lyon, Conservatoire National Supérieur de Musique, Salle Varèse
    par Mélody Louledjian et Thierry Ravassard
  • Création suisse en août.2004
    à Court, Académie européenne de chant
    par Mélody Louledjian et Thierry Ravassard

I. Jaillissement (Printemps)

Tu seras rose impalpable, éphémère
Tu t'évanouiras
La douce rose dispensera les pétales que je garderai
Et le Sakura jaillira de ses flocons légers et mousseux
Sur le tatami rose comme ta peau je m'endormirai.

II. Attente (Été)  

Tes nuits seront vides et en attente de fraîcheur
sous la voûte du ciel
Tu penseras à son corps jeune et vigoureux
Et tu songeras au jeune homme si tendre qui ne viendra pas
Tes larmes glissent
É perdument triste, tu t'endormiras.

III. Symphonie (Automne)  

Cet éclatement de l'automne éphémère se répand partout
Elle éclabousse, jaillit, s'élance, se dresse dans le ciel pur
Le vent les dispersera sur le tatami obscur qui les recevra
n'est plus le tapis
des floconneux sakura
les feuilles sont sèches.

IV. Cendres (Hiver)

Des tisons éteints ne viennent plus les senteurs
Ton corps s'amenuise
Sans attachement
Tu flottes comme un navire perdu et échoué
Ta main fragile et tendue vers le lointain caresse le vide
Tatami sans vie
le tatami paraît gris comme les cendres.